L’Allemagne demande la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim

France - 04/03/2016 13h20
Lu 9 406 fois -   LORACTU.fr La Rédaction
L’Allemagne demande la fermeture de la centrale nucléaire de Fessenheim
Economie
(PHOTO: ILLUSTRATION/ LORACTU.fr)

Berlin demande à la France la fermeture rapide de la centrale de Fessenheim (Haut-Rhin) en Alsace. Dans le même temps, nos voisins s’inquiètent de la sécurité de celle de Cattenom (Moselle) après la publication d’un rapport choc de soixante-dix pages visant le site lorrain.

Un porte-parole de la ministre allemande de l'Environnement Barbara Hendricks a estimé que la centrale nucléaire française de Fessenheim, toute proche de la frontière avec l'Allemagne et la Suisse, était «trop vieille» et «devrait être fermée le plus vite possible». Mme Hendricks, membre du parti social-démocrate (SPD), a déjà par le passé exprimé cette position sur Fessenheim, la plus vieille centrale du parc nucléaire français, revenue dans l'actualité en Allemagne vendredi à propos d'un incident survenu en 2014.

«Pour nous, il est très clair que Fessenheim est très vieille, trop vieille pour être encore en activité», a dit son porte-parole, interrogé lors d'un point de presse régulier du gouvernement. «La ministre demande à ce qu'elle soit fermée le plus vite possible», a-t-il ajouté. «Évidemment, un réacteur aussi âgé a beaucoup de problèmes techniques», a-t-il dit et, «pour nous, des réacteurs aussi vieux représentent un risque sécuritaire ». Il a évoqué «les inquiétudes des habitants des régions frontalières» alors que des élections régionales sont prévues dans le Bade-Wurtemberg (sud-ouest) le 13 mars.

- Un incident survenu en 2014 aurait été minimisé -

Un incident survenu en 2014 dans la centrale nucléaire de Fessenheim aurait-il été minimisé ? Deux médias allemands affirment, vendredi 4 mars, qu’il était plus important qu’annoncé. L’incident, qui s’est produit le 9 avril 2014 dans la doyenne des centrales françaises, a conduit à « une suite d’échecs techniques et de chaos » durant lesquels le réacteur 1 « n’était momentanément plus contrôlable », indiquent sur leurs sites Internet le journal Süddeutsche Zeitung et la chaîne locale WDR.

Selon ces deux médias, une fuite d’eau dans le secteur du réacteur 1 de la centrale a pénétré dans une armoire contenant des systèmes électriques et a « mis hors circuit » l’un des deux systèmes de sécurité. La cellule de crise décide alors de « couper le réacteur » en introduisant « du bore [une substance servant à réguler la puissance de la centrale] dans le système de refroidissement » du réacteur, expliquent la Süddeutsche et WDR.

L’incident a été classé au niveau 1 de l’échelle internationale des événements nucléaires (INES), qui compte huit niveaux de gravité, classés de 0 à 7, le niveau le plus grave. Pourtant, l’utilisation de bore est un procédé rarissime, indique à la Süddeutsche Zeitung l’expert nucléaire Manfred Mertins, qui dit n’avoir« connaissance d’aucun réacteur en Europe occidentale qui ait dû être arrêté avec un ajout de bore ».

« Le résultat montre que l’arrêt (…) n’était plus possible, à tel point que d’autres moyens devaient être mis en œuvre », s’alarme cet ancien expert de l’autorité de contrôle de la sécurité du nucléaire civile en Allemagne, aujourd’hui en retraite, qui parle d’un événement « très sérieux ».

- Cattenom aussi dans le viseur des allemands -

Quelques jours après, l’Agence de sûreté du nucléaire (ASN), le gendarme du nucléaire français, a écrit une lettre à la direction de la centrale, sans mentionner l’emploi de bore. Ce courrier contient « l’information selon laquelle pendant environ trois minutes, la température du réacteur était hors de contrôle », s’alarme M. Mertins, estimant que l’équipe a alors piloté le réacteur quasi à l’aveugle.

François Hollande a promis pendant la campagne présidentielle de 2012 de fermer la centrale alsacienne durant son quinquennat. Une fermeture qui s’annonce plus compliquée qu’il n’y paraît avec un coût important (plus de 2 milliards d’euros) et des conséquences sur l’emploi local. Le gouvernement a confirmé à plusieurs reprises une fermeture d’ici 2018. La droite quant à elle, aussi bien alsacienne qu’à Paris (Nicolas Sarkozy, Alain Juppé…) s’opposent à sa fermeture.

La centrale mosellane de Cattenom est aussi dans le collimateur de l’Allemagne – et du Luxembourg – qui exercent une pression importante sur la France pour sa fermeture. Un rapport publié par les Verts au Parlement allemand, sur 70 pages, s’agacent de normes se sécurités qui ne sont pas respectées. A en croire l’auteur de ce rapport, si la centrale était située en Allemagne elle serait déjà fermée.

(Avec AFP)

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