Au Front national, la guerre entre Marine et Jean-Marie Le Pen est totale
Le parti d’extrême droite s’enfonce dans la guette familiale qui est désormais totale. Lundi, le bureau exécutif du Front national a décidé de suspendre Jean-Marie Le Pen après une série de dérapages. Une suspension qui débouche sur une exclusion du fondateur du parti, sanction la plus lourde infligée à celui qui veut conserver son pouvoir de nuisance.
La guerre est totale. Au Front national, la fille et le père s’entretuent après la suspension lundi soir de Jean-Marie Le Pen. La plupart des membres du bureau exécutif du parti, sorte de conseil de discipline, ont mis fin hier à la carrière politique du «Menhir». Le FN a en effet décidé de «suspendre» provisoirement Jean-Marie Le Pen de son statut d’adhérent, une manière de mettre à la porte le fondateur du mouvement, âgé de 86 ans. Une assemblée générale extraordinaire qui se tiendra avant la rentrée – sous trois mois – devrait mettre fin au statut de président d’honneur occupé par Jean-Marie Le Pen. Exclu du parti dirigé par sa fille et orphelin de son titre, Jean-Marie Le Pen sera en marge complète du FN. Il conservera toutefois son mandat de député européen mais pourrait aussi être mis à l’extérieur du groupe FN à Strasbourg.
"Qu'elle change de nom en se mariant !" lance Jean-Marie Le Pen
Une motion a également été adoptée dans le parti pour que la parole de Jean-Marie Le Pen dans les médias n’engage plus le FN et sa responsabilité. Alors que la sanction est sévère et difficilement acceptée par le père, les deux Le Pen s’écharpent par médias interposés. Depuis lundi soir, Jean-Marie Le Pen multiplie les escalades verbales à la radio et à la télévision. «C’est une félonie. J’ai exprimé le souhait que Marine Le Pen me rende mon nom, a réagi Jean-Marie Le Pen, interrogé par l'AFP, sur Europe 1 ou encore sur BFMTV/RMC. Elle a la possibilité de le faire en se mariant soit avec son concubin, soit avec quelqu’un d’autre, après tout, pourquoi pas M. Philippot». «C’est déshonorant d’avoir le même nom que la présidente du FN», a encore lancé le patriarche, qui a assuré qu’il allait demander à l’administration du parti de lui «renvoyer une partie de [ses] cotisations. Comme j’ai adhéré à 1 000 euros, je trouve que c’est beaucoup».
"Si de tels principes moraux devaient présider à l'Etat français, ce serait scandaleux", après sa "trahison" à son égard, a déclaré l'eurodéputé. Souhaite-t-il sa victoire en 2017? "Pour l'instant, non" a rajouté M. Le Pen. "Ils doivent s'attendre à tous les moyens", a-t-il poursuivi. "Ce n'est pas impunément qu'on m'attaque, même dans le dos" a-t-il répondu à propos de possibles recours juridiques concernant son exclusion provisoire du FN. "Ca a été vu l'autre jour lorsque je me suis présenté sur la tribune place de l'Opéra, j'ai rassemblé un accueil sans équivoque" a-t-il assuré à propos de sa popularité au sein du parti, à la question de savoir s’il peut avoir les soutiens nécessaires contre sa fille Marine Le Pen qui est présidente depuis 2011.
Marine Le Pen dénonce la "violience" et la "dérive" de son père
Du côté de Marine Le Pen, "cette outrance montre qu'il n'y avait pas d'autre solution" que la suspension de Jean-Marie Le Pen, confie la présidente du FN à Europe 1. Marine Le Pen parle de "violence" et de "dérive" pour qualifier l'attitude de son père.
Son bras droit Florian Philippot a justifié mardi la sanction contre M. Le Pen, assurant que les militants FN s'étaient "lassés" de ses "provocations permanentes", "très éloignées de la ligne du FN, validée par les adhérents", passés de 22.000 à 42.000 depuis la prise de pouvoir de Marine Le Pen. En clair: mieux vaut ce mauvais moment de déballages médiatiques pour essayer de tourner définitivement la page Jean-Marie Le Pen.
Marie-Christine Arnautu, soutien historique de Jean-Marie Le Pen, a estimé mardi qu'on "ne jette pas le président fondateur du Front d'un revers de la main". Tout en tentant de minimiser la charge de Jean-Marie Le Pen, traduction d'une "blessure terrible". Avec Bruno Golnich, député européen mis en cause pour avoir frappé des journalistes du Petit Journal de Canal+ lors du défilé FN du 1er mai et Mme Arnautu, le fondateur du parti est plutôt isolé.
Les militants FN sont "lassés" par ces tensions, selon Philippot
Louis Aliot, Florian Philippot, Gilbert Colard, Robert Ménart, David Racheline, Nicolas Bay et de nombreux autres cadres sont sur la ligne de Marine Le Pen, dénonçant les dérapages verbaux du président d’honneur et souhaitant son retrait de la vie politique. Seule silencieuse, membre de la famille, la nièce-petite-fille Marion Maréchal Le Pen. Cette dernière a signé la motion interne pour que Jean-Marie Le Pen ne puisse plus parler au nom du FN.
La crise familiale s’invite dans la bataille des régionales. Marion Maréchal Le Pen, candidate en Provence Alpes Côté d’Azur (PACA) a affirmé vouloir se mettre en retrait et prendre du temps. Affectée par les propos violents de son grand-père à l’encontre de sa tante, Marion Le Pen a assuré au Figaro qu’elle était «choquée» et qu’elle se laissait «quelques semaines» de réflexion. Si un autre candidat est nommé dans cette région jugée gagnable par le parti d’extrême droite, elle «le soutiendrait».
Dans les sondages, Mme Le Pen ne semble pas pâtir pour l'heure de ces querelles familiales. "Le Front est plus haut que jamais", proclame M. Philippot en citant un sondage Odoxa publié mardi, qui met Marine Le Pen en tête d'un premier tour de la présidentielle, devant Nicolas Sarkozy et quel que soit le champion de la gauche, Manuel Valls ou François Hollande. Dans l'hypothèse d'un second tour face au président sortant, elle l'emporterait 52%-48%.
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