La Meurthe-et-Moselle va tester la "mixité sociale" dans quatre collèges de Nancy dès 2016
Le département va tester la mixité sociale dans quatre collèges de Nancy à partir de la rentrée 2016. La ministre de l’Education nationale veut mettre fin aux établissements «ghettos» et favoriser les classes où se mélangent enfants défavorisés, de classe moyennes ou de familles aisées.
«La mixité sociale ne se décrète pas en trois mois» assure Gilles Pécout, recteur de l’académie Nancy-Metz, ce jeudi. A partir de la rentrée 2016, cinq collèges vont tester la «mixité sociale» voulue par la ministre Najat-Vallaud Belkacem. «La zone d’expérimentation concernera des collèges de Nancy» a précisé Mathieu Klein, président (PS) du département de Meurthe-et-Moselle qui fait partie des 17 départements à expérimenter la mesure – qui fait polémique – dès la rentrée prochaine.
Les collèges Chopin, Alfred Maizières, de la Craffe et Guynemer seront les premiers à tester la mesure puis le collège Jean l’Amour sera le cinquième établissement à y recourir. Il est actuellement en reconstruction et sera fonctionnel dès la rentrée 2017. Le nouveau collège Artem en construction sera aussi de la partie mais dès la rentrée 2018-2019 ou 2019-2020 a précisé M. Klein.
«Les établissements qui font partie des Zone d’Education Prioritaires ne sont pas concernés par les annonces de la ministre car ils font déjà l’objet de mesures qui favorisent la mixité entre élèves» a noté le recteur de l’Académie.
Si Nancy fait l’objet de l’expérimentation c’est «parce que les collèges sont en zone urbaine. Les inégalités sont plus fortes dans les secteurs urbanisés. Par ailleurs, le réseau de transports en commun très dense et la proximité des établissements avec les lieux de vie permettent une meilleure application de la mesure» assure M. Klein.
En quoi consiste cette «mixité sociale» ? «Les lois se sont succédées depuis des décennies et le problème des collèges ghettos ne s’est pas amélioré» fustige Mathieu Klein dans une pique à peine voilée à la droite.
Des critères sociaux passés au peigne fin pour mieux répartir les élèves
Les collèges concernés par cette réforme accepteront des élèves de familles dont les catégories sociales sont variées, de quartier différents (zones aisées et zones populaires) ou encore basés sur les critères de bourses. Par exemple, des élèves qui habitent dans le quartier populaire du Haut du Lièvre à Nancy ne seront plus «condamnés» à rester entre eux mais pourront être inscrits dans d’autres établissements et inversement. «Il ne s’agit pas uniquement d’une réforme profitable aux enfants pauvres mais aussi à ceux issus d’une famille plus aisée» plaide le président du Conseil départemental qui a pour compétence la gestion des collèges.
A Lunéville – deux collèges – et Briey (Meurthe-et-Moselle), l’Education nationale expérimente déjà la +multisectorisaton+ consistant à ne plus affecter automatiquement des élèves à un établissement en fonction de son adresse.
«Il y a encore trop de concentration de pauvreté dans les collèges et notamment dans un même établissement» s’est alarmé le recteur de l’Académie Nancy-Metz qui a dit vouloir «corriger cela» tandis que Mathieu Klein a dénoncé une série de mesures» qui «n’a pas réglé le problème des inégalités» entre élèves issus de familles pauvres et plus aisées.
Conscient de la fronde de certaines familles opposées au concept de mixité sociale, le président du Conseil départemental a assuré défendre un modèle «entre rigidité et contrainte mais aussi liberté des parents». «On peut bouger, réformer mais dans la concertation avec les familles, le personnel et les enseignants» a poursuivi le socialiste notant que parmi les 17 départements concernés par les expérimentations certains sont à droite.
Les collèges privés sous contrat avec l’Education nationale ne se sont pas concernés «pour l’instant» par cette mesure de mixité sociale. Pour Gilles Pécout, les établissements de Meurthe-et-Moselle sont toutefois «intégrés aux consultations». Quant à savoir si des familles vont préférer scolariser leurs enfants dans le privé, opposés à ces mesures de mixité dans le public, il n’estime «pas mesurable ces conséquences» mais dit «ne pas les ignorer».
Trop de concentration d'élèves pauvres dans un même collège
«La mixité sociale n’est ni un slogan, ni une chimère, ou un totem. En République, c’est une nécessité», estime Najat Vallaud-Belkacem. «L’enjeu de la mixité sociale est central pour la réussite des élèves, notamment les plus fragiles (...). Les meilleurs élèves n'y perdent pas non plus : ils ne sont pas pénalisés scolairement et la mixité sociale constitue un enrichissement pour leur construction individuelle et citoyenne», justifie-t-elle.
Parmi tous les établissements français, «70 collèges accueillent plus de 82% de collégiens d'origine sociale défavorisée». A l'inverse, «70 collèges accueillent moins de 3% de collégiens d’origine sociale défavorisée». Cette ségrégation est «plus forte» dans les départements urbains selon le ministère de l’Education nationale. «La singularité de cette démarche repose sur une logique de construction à partir des acteurs et des besoins des territoires, le ministère se positionnant en impulsion et en appui de l’initiative locale», estime le ministère. La nouvelle carte scolaire, notamment en milieu urbain, pourrait être recomposée à partir du réseau de transports en commun.
Au total, le département de Meurthe-et-Moselle compte 79 établissements publics et le Conseil départemental dit avoir injecté 290 millions d’euros dans son plan collège pour la rénovation, la réorganisation et la construction qui s’étale de 2012 à 2021.
2Commentaires