A Verdun, un mémorial "new-look" pour célébrer le centenaire
Erigé en 1967 à l'initiative des anciens combattants comme un musée-sanctuaire de la bataille, le Mémorial de Verdun rouvre ses portes après plus de deux ans de transformations autour d'un but nouveau: transmettre une mémoire franco-allemande partagée.
Au centre de ce bâtiment blanc construit au milieu du champ de bataille, quelques marches conduisent à la crypte, un espace confiné où "Allemands et Français se confrontent dans l'intime", explique la scénographe et architecte Geneviève Noirot. C'est le lieu de la peur, l'effroi, le désespoir, que connurent les hommes d'un côté comme de l'autre de ce champ de bataille transformé en terrain lunaire par les millions d'obus.
Cette volonté d'inscrire la rencontre entre mémoires allemande et française était au coeur du projet de rénovation du Mémorial dont le but, souligne le directeur de l'établissement, Thierry Hubscher, est de "transmettre une Histoire partagée". Participèrent ainsi au comité scientifique qui présidait à la rénovation des chercheurs français et allemands - aux côtés de Britanniques et d'Américains.
A l'origine, le Mémorial avait été "voulu par les anciens combattants français pour perpétuer la mémoire de leur sacrifice: ils s'y sont rassemblés, lui ont confié des objets", remarque l'historien Antoine Prost, président du comité scientifique. Tout en restant fidèle à cette volonté, le défi est aujourd'hui "d'assumer aussi la dimension allemande de la bataille, de raconter celle-ci des deux points de vue, en montrant que la souffrance, les combats et la mort furent identiques des deux côtés".
"Nuit d'angoisse. La soif surtout est pénible". Ces quelques mots extraits du carnet du capitaine Delvert, exposé à l'étage, résument ce que la nouvelle scénographie essaie de transmettre: le quotidien de la bataille, le bruit, la peur, la boue. "Les corps et la terre se mêlent tout autour du Mémorial: on en joue dans l'exposition. Le destin de cette terre, le destin de ces hommes", explique la commissaire de l'exposition permanente, Edith Desrousseaux de Medrano.
Pour le centenaire de la bataille de Verdun
Au rez-de-chaussée, la boue est omniprésente. Là, sous un plancher transparent parsemé d'obus, ici en résine, au milieu d'une salle consacrée à la Voie sacrée, cette route par laquelle la partie française du front était sans relâche ravitaillée. "On a cherché à représenter, à faire ressentir une expérience en première ligne", souligne Mme Noirot. Au centre du bâtiment, des images de la bataille se succèdent sur un écran à pans brisés qui matérialise l'idée de monter au front.
Autour, les visiteurs peuvent enfiler un casque pour écouter les mots des soldats, avant de s'éloigner du front pour découvrir l'histoire des blessés, des télécommunications, des chiens et des chevaux pris dans la bataille.
De la terrasse supérieure du bâtiment, on embrasse du regard le champ de bataille, aujourd'hui mangé par les arbres et les croix blanches.
Sur la façade, gravés depuis 1967, les mots de Paul Valéry accueillent les visiteurs.
"Tous vinrent à Verdun comme pour y recevoir je ne sais quelle suprême consécration. Ils semblent par la Voie sacrée monter pour un offertoire sans exemple à l'autel le plus redoutable que jamais l'homme eut élevé".
(Avec AFP)
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