"Kinépolis" avale le cinéma de centre-ville à Metz, 2,5 millions d’€ d’investissement
Le groupe belge aura l’entière exclusivité de l’offre de cinémas à Metz (Moselle). Jeudi, Kinépolis s’est engagé à conserver l’esprit du cinéma d’arts et d’essai du centre-ville et d’y injecter 2,5 millions d’euros. Dans le même temps, il va construire un multiplexe à côté de Pompidou.
Kinépolis a officiellement avalé l’offre cinématographique de la ville de Metz. A termes, le groupe belge devrait détenir quatre cinémas dans l’agglomération sans compter celui de Thionville, de Nancy et le rachat des multiplexes luxembourgeois récemment annoncés. Le petit poucet belge devient grand et s’offre le luxe de barrer la route à ses concurrents Gaumont ou UGC qui voudraient s’implanter en ville. Jeudi, la ville a signé un accord avec le groupe pour officialiser leur mariage qui ne fait pas que des heureux.
Le cinéma Le Palace – qui reste propriété de la ville – est désormais exploité par Kinépolis. Le belge s’est engagé à injecter 2,5 millions d’euros pour rénover les sept salles du complexe, donner un coup de jeune au hall d’accueil et replacer dans la modernité ce cinéma mythique de Metz situé Place Saint-Jacques. Pour obtenir le marché, Kinépolis a aussi dû s’engager à conserver «l’âme» du cinéma de centre-ville avec une programmation art-et-essai. Dans le même temps, le cinéma voisin Caméo fermera (mais restera ouvert le temps des travaux du Palace).
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Selon le directeur général de Kinépolis France, il n’y a pas un réel monopole. Philippe Halhoute estime que lorsque «vous offre un certain nombre de films différents, la question du monopole ne se poste pas vraiment (…)» se défend le patron du groupe belge en France. «Parler de monopole dans le culture est déplacé» poursuit-il. «Le cinéma est une industrie» répond Hacène Lekadir, adjoint (PS) à la Culture. «L’industrie au sens moderne du terme nécessite des opérateurs qui ont des moyens de d’investir et de porter des projets sur le long terme. Kinépolis peut le faire» a assuré l’élu devant la presse.
Des tarifs qui "resteront abordables"
«Le cinéphile y trouvera son compte. J’ai une garantie d’indépendance totale sur la programmation» a assuré M. Humbert qui gère actuellement les deux cinémas Le Palace et Caméo Ariel. L’homme qui ne sera pas salarié par Kinépolis conserve sa fonction et pilotera la programmation du cinéma de centre-ville qui doit passer de 180 000 entrées par an à 300 000, selon Kinépolis. Un pari audacieux qui se basera sur des tarifs abordables. Kinépolis s’est engagé à conserver une tarification des places de cinéma attractive loin de ceux pratiqués dans ses multiplexes.
Kinépolis est aussi en pleine tractations pour ses deux nouveaux cinémas des centres commerciaux Waves et Muse. Le premier dont le centre a ouvert en octobre 2014 est bloqué par les recours. Si Kinépolis obtient gain de cause, le chantier pourrait commencer courant 2017. Du côté du quartier de l’Amphithéâtre près de Pompidou Metz, le cinéma Kinépolis devrait sortir de terre courant 2018. Le groupe belge doit encore déposer un dossier devant la commission départementale du commerce (CDAC). Si aucun recours n’est déposé, le cinéma devrait ouvrir peu après le centre commercial géant dont le lancement est prévu à l’autonome 2017.
L'opposition s'oppose au projet
Pour l’élu municipal d’opposition (Divers droite) Emmanuel Lebeau, «cette décision va conduire à un monopole sur l’offre cinématographique sur toute l’agglomération messine avec les déviances que cela peut conduire sur la politique tarifaire et de programmation. (…) Confier la gestion de l’ensemble de l’offre cinématographique à un géant commercial a toutes les chances de voir le prix des places augmenter fortement. Bye-bye, les places de cinéma commercial en plein cœur de ville à 7,20 euros (6 euros en tarif réduit). Bonjour le cinéma exclusivement à plus de 11,3 euros. Et oui, le monopole a un prix ! Ce sont de nombreux messins qui ne pourront plus gouter au plaisir de se rendre en famille au cinéma en centre-ville car trop cher qui en seront les premières victimes de cette mauvaise comédie» s’insurge M. Lebeau qui demande à la ville «d’abandonner» son projet avec Kinépolis.
Le FN est également vent debout contre le monopole de l'offre. "La fréquentation sera émiettée par l‘ouverture de deux multiplexes, le Kinépolis de l’Amphithéâtre et un autre à Waves (ZAC de Moulins-Les-Metz) au détriment du Kinépolis existant à St-Julien-les-Metz. L’étude de 2012 fait miroiter un bond de fréquentation de 1,2 millions de spectateurs actuellement à 1,8-2 millions… Comme Pompidou ? Comme le Mettis ? Les élus veulent-ils reproduire l’erreur des zones commerciales qui pullulent et se neutralisent mutuellement dans la région messine ? Déjà, la période de chantier sera très néfaste pour le centre-ville, les clients prenant d’autres habitudes. Et après ? L’immeuble du Caméo, jugé «non stratégique» par le président du groupe PS, sera bradé, dans un contexte immobilier morose à Metz" s'insurge Françoise Grolet, dans un communiqué.
La conseillère municipale Christine Singer (Parti Libéral Démocrate) déplore "qu'aujourd'hui, sans passer par la case conseil Municipal (on doit valider cette décision jeudi prochain donc à posteriori), on nous annonce le mariage entre la ville de Metz et Kinépolis. On connaît les maris, mais on connaît surtout les cocus : les citoyens, contribuables de la ville de Metz. Le maire a le devoir d'expliquer les motifs/raisons de ce choix qui va créer un monopole cinématographique d'ampleur de Kinepolis sur notre territoire. À qui profite ce choix au final ?" s'insurge Mme Singer opposée de longue date au projet d'accord entre Kinépolis et la ville de Metz.