A Nancy, l'ombre de Jacqueline Sauvage plane sur le procès d'une femme meurtrière

Nancy - 22/03/2016 17h00
LORACTU.fr La Rédaction
A Nancy, l'ombre de Jacqueline Sauvage plane sur le procès d'une femme meurtrière
Société
La femme est accusée d'avoir tué d'un coup de fusil en plein coeur son compagnon. Elle affirme avoir vécu 35 ans de viols et de violences de son compagnon.

Sylvie Leclerc, 53 ans, a-t-elle voulu se libérer de l’emprise «perverse» et «dominatrice» de son compagnon, lorsqu’elle l’a tué en 2012? C’est la question qu’a commencé à examiner ce lundi 21 mars la cour d’assises à Nancy, où les soutiens de l’accusée décrivent une nouvelle affaire Jacqueline Sauvage.

Un soir de mai 2012, Mme Leclerc a tué son compagnon, Gérard Schahan, un éboueur de 58 ans dont elle partageait la vie depuis 35 ans et dont elle a eu une fille. Elle l’a abattu d’une balle de fusil tirée à bout portant dans le thorax, tandis qu’il dormait dans le lit conjugal de leur appartement situé en banlieue de Nancy.

«On était au lit, tranquilles (...) Une voix me dit à ce moment-là: +Sylvie, tu as assez souffert, il faut que ca s’arrête.+ Et tout s’est enchaîné», a raconté en pleurs cette petite femme aux cheveux bruns et courts, qui s’est présentée à la cour vêtue d’un haut bleu à paillettes, un crucifix autour du cou. Après le meurtre, elle s’est réfugiée chez des voisins, et leur a demandé d’appeler la police, en précisant: «Il me harcelait, je serai tranquille!»
Devant la cour, l’accusée a tenté de décrire son quotidien: «Il me levait à 3H00 du matin tous les jours. Il me disait +tu ne te sauveras pas!+». Devant les enquêteurs, elle avait décrit un compagnon «psychopathe» et «possessif», un «dictateur» raciste, qui la contraignait à s’agenouiller devant lui, et lui imposait des rapports sexuels forcés.

Encore aujourd’hui, en prison, «la nuit, il est là, il me surveille. Il me dit +je ne te laisserai pas+», a murmuré Mme Leclerc devant la cour. «Je voudrais qu’on me soigne. Mais là en prison, personne n’est là pour m’aider», a-t-elle ajouté, d’une voix effondrée, avant que la présidente ne suspende l’audience pour lui permettre de reprendre ses esprits.

Pour l’une des ses avocates, Me Nathalie Tomasini, Mme Leclerc a subi «des années d’humiliation» qui «l’ont conduite à une altération du discernement». L’accusée «a entendu des voix qui l’ont inexorablement conduite au passage à l’acte», a-t-elle expliqué en marge de cette première journée du procès.

- Une "comparaison scandaleuse" avec l'affaire Sauvage -

Avec sa consoeur Janine Bonaggiunta, également présente à Nancy, Me Tomasini avait déjà défendu Jacqueline Sauvage, devenue un symbole des violences faites aux femmes après sa condamnation en décembre à Blois à 10 ans de réclusion pour le meurtre de son mari violent, mais qui a bénéficié ensuite d’une grâce présidentielle partielle. Selon Me Nathalie Tomasini, «le point commun entre les deux dossiers est le phénomène d’emprise et le fait que le passage à l’acte soit déclenché par un stimulus qui ravive les traumatismes vécus depuis des années».

La comédienne Eva Darlan, créatrice du comité de soutien à Jacqueline Sauvage, est venue assister lundi à l’ouverture du procès. «Sylvie Leclerc a tué son bourreau», a-t-elle souligné sur Twitter. «On est tous coupables, on a tous tué le mari de Jacqueline Sauvage et le compagnon de Sylvie Leclerc, parce que ces femmes, on ne les a pas entendues, pas écoutées», a-t-elle dit aux journalistes lors d’une suspension d’audience.

Les parties civiles, cependant, s’opposent vivement à tout parallèle entre les affaires Leclerc et Sauvage. Cette comparaison est «scandaleuse pour la mémoire de Gérard Schahan», a ainsi souligné devant la presse Me Philippe Lyon, qui représente notamment la mère de la victime. «Non, ce n’est pas le procès des femmes battues, mais le procès d’une femme qui a tué son mari de sang-froid», a renchéri Me Rui Manuel Pereira, qui représente le frère de Gérard Schahan.

«Elle était malade et des experts psychiatres ont reconnu qu’elle était atteinte d’une altération du discernement, mais il n’y a aucune trace de violence conjugale dans ce dossier», a-t-il précisé. Selon Me Pereira, «c’est la maladie et toute une vie faite de malheur qui l’ont fait passer à l’acte».

Sylvie Leclerc encourt la réclusion criminelle à perpétuité. Le verdict est attendu jeudi.

(Avec AFP)

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