Présidentielle: Le Pen choque sur le rôle de la France sous l'occupation nazie
La candidate du Front national a ouvert une polémique dimanche à moins de deux semaines du premier tour de la présidentielle. Marine Le Pen a remis en cause l’implication de la France sous l’occupation nazie lors de la rafle du Vél’d’Hiv. Isolée, elle est critiquée par tous ses concurrents.
Invitée du «Grand Jury RTL-Le Figaro-LCI» dimanche, Marine Le Pen a jugé dimanche que la France n'était «pas responsable» de la rafle du Vél‘d'Hiv en 1942 à Paris, au cours de laquelle plus de 13.000 juifs avaient été arrêtés. «Je pense que la France n'est pas responsable du Vél‘d'Hiv», a répondu la candidate du Front National à l'élection présidentielle, interrogée sur cette rafle et la décision du président Jacques Chirac de reconnaître en juillet 1995 la responsabilité de la France.
«Je pense que de manière générale, plus généralement d'ailleurs, s'il y a des responsables, c'est ceux qui étaient au pouvoir à l'époque, ce n'est pas LA France. Ce n'est pas LA France», a-t-elle déclaré. «La France a été malmenée dans les esprits depuis des années», a dénoncé la présidente du parti d'extrême droite. «En réalité, on a appris à nos enfants qu'ils avaient toutes les raisons de la critiquer, de n'en voir peut-être que les aspects historiques les plus sombres», a-t-elle regretté, ajoutant: «Donc, je veux qu'ils soient à nouveau fiers d'être Français.»
Des propos qui ont fait réagir son premier concurrent, au coude-à-coude dans les sondages, Emmanuel Macron. «D'aucuns avaient oublié que Marine Le Pen est la fille de Jean-Marie Le Pen», a réagi le candidat dimanche soir sur BFMTV. «Il ne faut pas avoir de complaisance ou minimiser ce qu'est le Front national aujourd'hui dans notre pays. Donc c'est une faute grave, ce qu'elle a fait», a-t-il jugé. «Je pense que Jacques Chirac avait justement pris ses responsabilités et eu un geste courageux».
«En niant la responsabilité de l'État français sur le Vél‘d'Hiv, Marine Le Pen rejoint son père sur le banc de l'indignité et du négationnisme», a jugé sur Twitter Christian Estrosi, président LR de la région Paca. «Hommage à Jacques Chirac, qui, le premier, avait eu le courage de reconnaître que l'État français avait, ce jour-là, commis l'irréparable», a-t-il ajouté.
- Israël et des associations dénoncent la sortie de la candidate -
Le Crif et l'Union des étudiants juifs de France (UEJF) ont également dénoncé, dans des communiqués séparés, «des propos révisionnistes». Pour l'UEJF, «cette déclaration de Marine Le Pen s'inscrit dans la lignée révisionniste du Front national». «Ses déclarations sont une insulte à la France, qui s'est honorée en 1995 à reconnaître sa responsabilité dans la déportation des juifs de France et faire face à son histoire, sans mémoire sélective», a fustigé le Crif.
«Marine Le Pen, héritière d'un cloaque bâti sur les décombres de Vichy et de l'OAS, a estimé aujourd'hui que la France n'avait aucune responsabilité dans la rafle du Vel d'Hiv. Pour mémoire, le 16 juillet 1942, sous les ordres de Bousquet (secrétaire général de la police nationale) et avec le seul concours des forces de l'ordre françaises, 13.152 juifs dont 4.115 enfants furent raflés à Paris, parqués dans des conditions d'épouvante au Vel d'Hiv puis déportés et quasi intégralement exterminés à Auschwitz. Seuls quelques dizaines d'individus survivront à ce crime antisémite. Pour mémoire encore, parmi les fondateurs du FN figurent plusieurs collabos, miliciens et Waffen-SS condamnés à la Libération» a attaqué Dominique Sopo, président de SOS Racisme.
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«Si on doutait que Marine Le Pen est d'extrême droite, on ne peut plus en douter» a réagit Benoit Hamon, le candidat du PS sur RTL lundi matin. Et Benoît Hamon de prévenir les électeurs du Front national : «L'extrême droite, lorsqu'elle a été portée au pouvoir par les urnes a rarement rendu le pouvoir par les urnes. Le bulletin de vote, c'est souvent la dernière arme que l'on a, le dernier pouvoir pour changer son propre destin comme celui de la nation».
- Tous les candidats condamnent les propos de Mme Le Pen -
Lundi sur LCI, Nicolas Dupont-Aignan a lui distingué «la France qui a sali la France, celle de Vichy, et la France qui a sauvé l'honneur, face à la collaboration». Jean Lassalle, candidat à l'élection présidentielle a lui aussi critiqué les propos de Mme Le Pen. «Je regrette profondément que Marine Le Pen ait prononcé ces mots, à un moment où la campagne présidentielle donnait enfin des signes d'un démarrage, après avoir été inaudible, indigne et honteuse pour notre pays», a-t-il déclaré à BFMTV.
François Fillon s’est démarqué en affirmant lundi que «la vérité, c'est que le Vel d'Hiv a été un crime qui a été commis par l'État français, par le régime de Vichy, bien sûr, mais aussi par l'administration qui a secondé les décisions qui ont été prises par le gouvernement français», a réagi le candidat Les Républicains, en marge d'un déplacement lundi après-midi au Plessis-Robinson (Hauts-de-Seine). «Je trouve que le Front national est extrêmement mal placé pour parler de ces sujets, lui qui compte encore dans ses rangs beaucoup de nostalgiques du régime de Vichy», a commenté lundi M. Fillon.
Lundi, le quotidien Le Monde a jugé qu'elle avait «franchi une ligne rouge: celle du consensus national sur la lecture des épisodes les plus douloureux de l’histoire de France», dénonçant dans son éditorial un «roman national» «anachronique et nauséabond».
Israël, dont la politique officielle est de n'avoir aucun contact avec le FN accusé d'antisémitisme, a pour a part condamné une déclaration «contraire à la vérité historique telle qu'elle a été exprimée par les déclarations des présidents de France».
Marine Le Pen se dit l'objet d'une "instrumentalisation politique"
"Je suis évidemment indignée par cette opération d'instrumentalisation politique", a affirmé Mme Le Pen, évoquant des "méthodes indignes". "Un certain nombre de personnes cherchent à opérer toutes les instrumentalisations politiciennes possibles. Là, ça me paraît tout à fait évident, je suis du côté des gaullistes historiques", a-t-elle encore accusé interrogée par Le Figaro lundi après-midi, interrogée sur la polémique provoquée par ces propos.
"Je condamne évidemment absolument sans réserve le régime collaborationniste de Vichy et les atrocités qu'il a commises ou laissé commettre, ma position vise à ne lui donner aucune légitimité", a ajouté Mme Le Pen.
"La Caste, simplement pour créer une polémique électorale, vient de passer 24h à cracher sur cet homme et son héritage. Quelle bassesse..." a réagit sur Twitter lundi soir Florian Philippot, vice-président du parti, en évoquant le Général De Gaulle. "On savait déjà qu'il n'était pas gaulliste. Il est même anti-gaulliste !" a-t-il ajouté en répondant à François Fillon.
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